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La rémunération de la clause de non-concurrence





La validité d’une clause de non-concurrence est conditionnée par le versement par l’employeur au salarié d’une contrepartie financière. Un rappel des règles applicables en matière de rémunération des clauses de non-concurrence.
A titre liminaire, il sera rappelé que les parties peuvent librement déterminer le montant de l’indemnité de la clause de non-concurrence. Cependant, l’employeur est tenu de respecter le montant convenu dans les éventuelles dispositions de la convention collective applicable, les dispositions les plus favorables au salarié devant s’appliquer.
Le montant de la contrepartie financière
Ce montant est généralement calculé sur la base du salaire des trois ou douze derniers mois. L’employeur doit seulement veiller à ce que ce montant ne soit pas dérisoire. L’existence d’une indemnité dérisoire pourrait en effet être assimilée à une absence de contrepartie et la clause pourrait être annulée. Dans ce cas, le juge ne peut substituer son appréciation à celle fixée par les parties et après avoir décidé de l’annulation de la clause, accorder au salarié la contrepartie qu’il estime justifiée (Soc, 16/05/2012). A titre indicatif, a été jugée dérisoire une indemnité de 2,4 mois de salaires pour 24 mois d’interdiction de concurrence (Soc, 15/11/2006) ou encore une indemnité de 1,14 mois sur la base du dernier mois travaillé pour six mois d’interdiction (Soc, 16/05/2012). En pratique, la contrepartie varie entre un quart et deux tiers du salaire, en fonction notamment de l’étendue de l’interdiction de concurrence. La jurisprudence a par ailleurs précisé que le montant de la contrepartie financière ne peut dépendre uniquement de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise (Soc, 07/03/2007).
Les modalités de versement
La contrepartie financière est la plupart du temps versée mensuellement. Les parties sont cependant libres de choisir ses modalités de versement, sous réserve que le règlement n’intervienne pas en fin de période d’interdiction de concurrence. Les sommes sont exigibles dès le départ effectif du salarié de l’entreprise, notamment en cas de dispense de préavis (par exemple, Soc, 21/01/2015). Elles doivent n’être versées qu’après la rupture du contrat de travail. Il n’est donc pas possible de prévoir que l’indemnité soit intégrée au salaire versé pendant l’exécution du contrat, cette pratique ayant été invalidée par la jurisprudence (Soc, 07/03/2007, Soc, 15/01/2014). Ayant la nature d’un salaire, elles ouvrent donc droit à congés payés, doivent figurer sur le bulletin de paie et sont soumises à charges sociales et à l’impôt sur le revenu.
Les (faux) moyens d’échapper au versement
La contrepartie doit être versée quelles que soient les circonstances de la rupture. L’indemnité est par conséquent due même en cas de licenciement du salarié pour faute (Soc, 09/04/2015). En outre, une jurisprudence récente remet en cause les conventions collectives qui prévoient une minoration de la clause de non concurrence en fonction du mode de rupture du contrat de travail (Soc, 14/04/2016). Cependant, la clause peut exclure son application pour certains types de ruptures (par exemple pour les licenciements économiques). S’agissant des ruptures de périodes d’essai, la jurisprudence n’est pas fixée. Il est donc préférable de préciser lors de la rédaction de la clause si les parties entendent ou non étendre l’interdiction de non concurrence à cette hypothèse.
Sauf disposition conventionnelle contraire, la reprise d’une activité par le salarié est également sans incidence sur l’exigibilité de l’indemnité. Son versement est ainsi dû même si le salarié a retrouvé une activité professionnelle, ou encore s’il est en retraite.
Les (vrais) moyens d’échapper au versement
Si le salarié ne respecte pas son engagement de non-concurrence, l’entreprise est dispensée de verser la contrepartie financière. De même, l’absence de règlement de la contrepartie par l’employeur libère le salarié de son obligation.
Enfin, l’employeur peut, sauf disposition collective contraire, se dégager de son obligation financière en renonçant unilatéralement à la clause. Pour être valable, la renonciation doit être prévue contractuellement et intervenir avant que le salarié ne quitte l’entreprise (Soc, 11/03/2015). A défaut, l’indemnité est due.
La fin de la présomption de préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non concurrence
Depuis un revirement de jurisprudence du 25 mai 2016, la Cour de cassation est revenue sur la présomption de préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non concurrence.
En effet, la chambre sociale estime désormais que « l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relève du pouvoir souverain du juge du fond ». Ainsi, le salarié devra dès à présent prouver l’existence d’un dommage découlant de la nullité de la clause de non concurrence s’il veut obtenir des dommages et intérêts (Soc, 25/05/2016).
La chambre sociale de la Cour de cassation précise au fur et à mesure de ses arrêts les contours du régime de la rémunération de la clause de non-concurrence. De nouvelles décisions devraient prochainement venir compléter les règles précitées. A suivre donc.