Les footballeurs, ces artistes …

articles

Les footballeurs, ces artistes…

Claudia Massa, avocat associé



Les footballeurs professionnels ne sont pas encore assimilés aux artistes de spectacle mais ils s’en rapprochent…

Mercredi 26 octobre 2016, le Sénat a adopté la proposition de loi de Dominique BAILLY et Didier GUILLAUME visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs.

L’article 7 de cette proposition de loi modifie le code du sport pour prévoir la possibilité pour les clubs de rémunérer les sportifs et les entraineurs professionnels non plus seulement au moyen d’un salaire, comme c’est le cas aujourd’hui, mais également pour partie au moyen d’une redevance, comme les artistes de spectacle.

Réduire les écarts de charges sociales
L’objectif affiché de cette évolution est d’améliorer la compétitivité du football professionnel français, en réduisant les écarts de charges sociales pesant sur les clubs français, 42 fois supérieures par exemple à celles applicables en Allemagne selon le rapport remis par Monsieur Glavany à la Ministre des sports en 2014. Evidemment les autres disciplines sportives en bénéficieront.
Le joueur ou l’entraineur professionnel pourra recevoir du Club en complément de son salaire correspondant à son activité exigeant sa présence physique au sein de l’équipe, une rémunération sous forme de redevance correspondant aux recettes de commercialisation de son image, de son nom ou de sa voix.
C’est ce qui est prévu pour les artistes de spectacle à l’article L.7121-8 du code du travail qui dispose : « La rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ».

Une redevance proportionnelle aux recettes…
Le texte adopté par le sénat précise bien que le contrat commercial qui pourrait être conclu entre le Club et le sportif ou entraineur professionnel sera distinct du contrat de travail, pour éviter tout risque de requalification.
La proposition de loi renvoie à un décret pour fixer les modalités d’application du contrat commercial mais indique d’ores et déjà que le montant de la redevance versée doit notamment être fonction des recettes générées par l’utilisation et l’exploitation commerciale de l’image, du nom et de la voix et que les modalités de calcul de la redevance doivent figurer dans le contrat commercial à peine de nullité.

… et plafonnées
Les redevances seront également plafonnées par discipline, et ne pourront pour l’ensemble des sportifs ou entraineur d’un Club excéder, selon le texte actuel, 10% des recettes générées par l’utilisation et l’exploitation commerciale.

Enfin, les modalités d’application de ces dispositions devront être précisées par une convention ou un accord collectif national conclu par discipline.
Il est fort probable que ce mécanisme soit encore complété ou modifié avant l’adoption de la loi. Le texte déposé initialement ne prévoyait pas un plafond de 10% des recettes, mais limitait le montant de la redevance en fonction de la rémunération du joueur, la redevance ne devant pas constituer la part prépondérante de la rémunération du joueur.
Le rapport Glavany de 2014 proposait lui, que chaque club définisse chaque année un taux de redevance collectif, et non individuel, calculé selon le ratio entre les recettes éligibles (ensemble des recettes des clubs non liées à la présence physique des joueurs mais résultant de l’exploitation de toute ou partie de l’image de l’équipe : contrats de sponsoring, d’image de merchandising, ventes de droits audiovisuels différés …) et le chiffre d’affaires d’exploitation total. Il était même proposé que la redevance soit définie en début de saison et versée sous forme d’avance, avec une régularisation en fin de saison.

A suivre pour anticiper…
Les impacts de ce texte pour la gestion des Clubs et du patrimoine des joueurs sont nombreux.
Compte tenu du processus législatif et des probables modifications qui interviendront, Clubs et joueurs devront encore patienter avant de pouvoir intégrer le bénéfice de ces dispositions dans leur gestion… à suivre.

Photo : © Fluidworkshop | Dreamstime.com

Lire l’article 7 adopté par le Sénat

Date de mise à jour  : 27/10/2016